Malgré une relative récession actuelle, le marché de la mode et de l’habillement est encore l’un des plus dynamiques du monde, et présente de fortes particularités dans l’organisation et l’évolution de sa supply chain, notamment en intralogistique. Entre les effets (de mode) et les tendances plus durables, on commence par décrypter les spécificités et les enjeux de l’habillement, ainsi que leurs impacts au sein des entrepôts du secteur.
(Petite) histoire de la supply chain de l’habillement
Pour bien comprendre les évolutions récentes de la supply chain de l’habillement, rappelons-en d’abord quelques étapes importantes, qui ont marqué sa structuration – finalement assez jeune – au cours de l’histoire moderne :
- Au XIXe siècle, l’industrialisation a donné naissance à une production textile de masse, faisant évoluer les compétences des travailleurs et leurs conditions de travail, avec le passage d’une fabrication manuelle aux premières formes d’automatisation, qui ont trouvé dans l’industrie textile un terrain d’expérimentation privilégié.
- La mondialisation émerge ensuite peu à peu, avec des chaînes d’approvisionnement textile qui commencent à se globaliser et à se complexifier, et une nouvelle répartition des tâches qui fera long feu entre fournisseurs de matériaux, fabricants de produits finis, et revendeurs en bout de chaîne.
- En même temps que l’apparition de la haute couture, le XXe siècle a lui apporté les droits sociaux, mais aussi la production en série, et l’essor des matériaux synthétiques, qui ont impacté l’industrie de la mode et de l’habillement, en même temps que des effets parfois négatifs sur l’environnement…
- Dans le dernier quart du siècle dernier, enfin, une double révolution se produit avec d’un côté l’arrivée de la fast-fashion et de l’autre du e-commerce. Ce qui a tout changé – ou presque – dans la façon de consommer et de distribuer la mode.
Fast-fashion
A bas prix, des vêtements stylés qui passent en très peu de temps de la phase de design à la production puis à la vente : le concept de fast-fashion, qui a fait long feu depuis, débarque dès les années 1970. Zara, H&M, Uniqlo, Gap sont quelques exemples de marques emblématiques de cette mouvance, qui a radicalement changé les modes de consommation dans l’habillement, mais aussi sa supply chain. Avec des renouvellements de collections plusieurs dizaines de fois par an (toutes les deux semaines pour Zara), dans une logique de push poussée à l’extrême (voir ci-dessous), il s’agit bien sûr pour ces acteurs de designer des modèles d’approvisionnement et de distribution capables de répondre à ces ambitions de rapidité.
Une mode désormais largement connectée
Avec les énormes succès actuels des géants du secteur online de l’habillement, principalement asiatiques comme JD, Shein, Amazon, Coupang ou encore VIP, le e-commerce de l’habillement affiche – toujours – des revenus et une croissance records. Alors qu’en 2020, les commandes d’habillement en e-commerce ne représentaient que 30 % des achats, les experts estiment en effet que ce taux atteindra plus de 40 % d’ici à 2025.
Où en est la mode, maintenant ?
La consommation de vêtements a explosé au cours des 20 dernières années. Les consommateurs de mode achètent en effet plus de 80 milliards de nouvelles pièces de vêtements chaque année, ce qui représente une augmentation de plus de 400 % par rapport à ce que nous consommions il y a seulement deux décennies.
Au global pourtant, après des années de croissance continue, confirmée malgré le COVID du début de l’année 2020 à la mi-année 2022, le marché de l’habillement rencontre depuis 2022 une certaine récession, et ne connaîtra vraisemblablement pas de réelle embellie d’ici la fin de l’année 2023. Même s’il existe des exceptions notables en termes de secteurs (sport ou encore luxe) ou de zones géographiques (Asie et Amérique du Nord), le marché de l’habillement est au global moins dynamique que par le passé, en termes de revenus globaux. La raison principale : l’inflation généralisée qui fait grimper le prix des matières premières en même temps que celui des produits finis, et organise des reports d’achats de la part des consommateurs, qui vont privilégier en ces temps de vaches maigres des produits plus essentiels que ceux visant à garnir leur garde-robe.
Plus de saisons ?
L’un des déterminants actuels majeurs de la supply chain de l’habillement est aussi la saisonnalité des commandes, qui devient de plus en plus flottante et imprévisible. Autrefois, les tendances de la mode suivaient des cycles saisonniers bien définis, structurés autour des changements de saisons météorologiques et des périodes de soldes. Mais ça… c’était avant la fast-fashion et ses nombreuses collections inter-saisons. Par ailleurs, dans le monde digitalisé actuel, de nouvelles tendances peuvent apparaître et disparaître en quelques semaines seulement, la viralité des réseaux sociaux accentuant fortement ce phénomène. Cette saisonnalité de plus en plus rapide et imprévisible signifie que les opérateurs de la mode et de l’habillement doivent constamment ajuster leur stock et leur stratégie supply chain pour répondre aux variations de la demande, et à leurs propres stratégies. Nous traitons plus en détail ce sujet de la saisonnalité, appliquée à la logistique de l’habillement, dans cet article.
Personnalisation et diversité des produits et des canaux
Les consommateurs d’habillement exigent de plus en plus des produits personnalisés voire uniques, ainsi que des modes de livraison et de retours ultra-diversifiés. Pour la supply chain de l’habillement, cela implique d’avoir à gérer un assortiment de produits plus diversifiés, et une rotation de produits beaucoup plus importante que par le passé, complexifiant notablement les processus de fabrication, mais aussi de gestion des stocks et de préparation de commande. D’autant plus dans une logique désormais largement omnicanale.
Apologie de la vitesse
Sous l’effet du e-commerce, les consommateurs, confortés par les géants du secteur qui suivent la tendance voire créent de nouveaux standards en la matière, l’impatience des consommateurs impose un rythme de plus en plus effréné aux entreprises du secteur. Et cela se ressent dans les entrepôts, qui peinent à suivre le mouvement, pénalisés par une main-d’œuvre durablement indisponible.
Et ça revient
Si l’on achète globalement – beaucoup – plus de vêtements qu’auparavant, le taux de retours augmente lui aussi drastiquement. Alors qu’en moyenne, ce taux est de 20% – tous secteurs e-commerce confondus -, il atteint aujourd’hui 25 % pour les ventes e-commerce d’articles d’habillement. Ce qui implique pour les entreprises, et notamment celles qui gèrent les retours dans les entrepôts – et pas en magasins -, d’adopter une politique de gestion dynamique et agile en matière de reverse logistics, pour traiter les retours et rapidement reconstituer l’inventaire en vue de ventes futures, tout en limitant la perte de valeur liée à ces opérations.
Durabilité et éthique
Les consommateurs sont de plus en plus soucieux de l’impact environnemental et social de leurs comportements d’achat, notamment en matière de mode. Au-delà du produit en lui-même, les opérateurs doivent donc gérer leurs opérations de manière plus durable, ce qui peut nécessiter des changements dans les matériaux d’emballage, les méthodes de transport et les pratiques de gestion des déchets, ainsi que la traçabilité des produits.
Stratégie supply chain en habillement : une question de style
Pour faire face à ces nombreux enjeux et évolutions rapides, il n’existe pas de modèle unique de supply chain dans le domaine de la mode et de l’habillement. Car ce marché est composé d’une multitude de sous-catégories, de familles de produits, et de modèles d’entreprise qui répondent à des contraintes et des objectifs très différents. En voilà une classification simplifiée.
D’un côté, les articles standards produits en masse, et distribués via des chemins non-complexes, s’accommodent plutôt d’un modèle de supply chain privilégiant l’efficience, et de nature plutôt fixe, sans grande variation ou changement de structure dans le temps. Ce premier type de supply chain visera alors l’optimisation en termes de productivité et de dépenses. Ici, la production est massive, le stock est conséquent, et les consommateurs sont approvisionnés en continu, dans une logique de “push”, où les opérateurs tâchent au mieux d’anticiper leurs demandes et comportements.
A l’autre extrême, on trouve des opérateurs et marques d’habillement qui misent davantage sur l’innovation et l’ultra-personnalisation – dans les produits, l’acte d’achat, mais aussi dans les canaux de distribution et de retours multiples qu’ils proposent. Cette deuxième grande famille suit quant à elle des modèles de supply chain visant principalement la flexibilité. Car tout l’enjeu est ici de répondre à l’incertitude liée à l’évolution rapide et imprévisible des demandes consommateurs, et aux renouvellements réguliers des collections qui en découlent. A l’inverse, le nombre d’articles par référence est ici plus bas, et la stratégie supply chain est qualifiée de “pull”, car ce sont les consommateurs qui déterminent le design – nécessairement évolutif – de leur stratégie supply chain.
Doser l’efficience et la flexibilité
Cette classification est bien évidemment très schématique, et la vérité des opérateurs de la mode et de l’habillement se situe en réalité entre les deux. Au final, il s’agit pour ces derniers de synthétiser leurs différents déterminants “client – produit – process”, pour concevoir une stratégie supply chain bien souvent mixte de type “push-pull”, assurant un dosage bien dosé entre efficience (push) et flexibilité (pull) en fonction de leur business model, et qui leur permettra de dégager un maximum de valeur ajoutée.
En conclusion, face à la récession récente, la saisonnalité rapide des tendances, la personnalisation croissante des produits, la pression pour la rapidité et la durabilité, les opérateurs doivent jongler entre la performance et la flexibilité pour répondre aux attentes des consommateurs et aux changements constants du marché, ce qui leur impose d’innover constamment comme nous l’abordons dans cet article. Alors que la conscience environnementale et sociale s’accroît, la recherche de solutions durables et éthiques devient elle aussi incontournable. En fin de compte, la stratégie supply chain du secteur textile est un équilibre subtil entre les différents impératifs du marché, visant à maximiser la valeur ajoutée tout en conservant une bonne dose d’adaptabilité dans un environnement en constante évolution.
Des solutions taillées pour l’habillement
Exotec® conçoit, produit et maintient des solutions robotiques pour entrepôts, dans le monde entier. En particulier pour le secteur du prêt-à-porter et de la chaussure, qui représente près de 50 % de nos projets. Particulièrement adapté aux enjeux des entrepôts d’habillement, notre système Skypod® offre la performance, la réactivité et la flexibilité dont les opérateurs intralogistiques de ce secteur ont besoin.
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